Centurie, Giorgio Manganelli

Centurie, Giorgio Manganelli

Centurie

Traduit de l’italien par Jean-Baptiste Para, Editions Cent Pages, 216 pages

5/5

Les cent « romans fleuves » de Manganelli sont contenus dans un très bel ouvrage édité chez Cent pages (il en fait 216, c’est écrit au dos parce que les pages ne sont pas numérotés à l’intérieur) avec le texte écrit sur la page de droite, avec une pousse de chiffres en lettres qui partant du haut de la page s’écoule pour rejoindre le bas de la page de gauche. Cent textes qui se déplient en perspective, faits de surfaces que l’on contourne pour observer les formes géométriques ainsi fabriquées… perspectives infinis formant in fine un corps. Le corps dans son humaine solitude, intranquille et désamouré, s’enfonçant les ongles dans la chaire pour sentir la réalité, tandis qu’au dehors elle est un carnage ; il rêve de fées et de fantômes, se demande si être mort depuis une minute ou l’être depuis cent millions d’années fait une différence… Les romans de Manganelli donnent une impression de flottement, d’une grande tendresse ; imaginez un Borges possédé par l’esprit de Gogol.

Un écrivain écrit un livre sur un écrivain qui écrit deux livres, l’un et l’autre sur un autre écrivain, dont l’un écrit parce qu’il aime la vérité, l’autre parce qu’elle lui est indifférente. De la plume de ces deux écrivains sortent au total vingt-deux livres où l’on parle de vingt-deux écrivains dont certains mentent sans le savoir, certains mentent en le sachant, certains cherchent la vérité en sachant ne pouvoir la trouver, certains croient l’avoir trouvée, d’autres encore croyaient l’avoir trouvée mais commencent à en douter. Les vingt-deux écrivains produisent au total trois cent quarante-quatre livres où l’on parle de cinq cent neuf écrivains, étant donné qu’en plus d’un livre un écrivain épouse une femme écrivain, et ont entre trois et six enfants, tous écrivains […]

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